En politique on a parfois des surprises : à « droite » on se réclame des valeurs de « gauche », à gauche certains font l’éloge du « social-libéralisme », et des alliances se nouent de l’extrême gauche à l’extrême droite sur la souveraineté de l’Etat (pas des citoyens) en danger. Martine Aubry, la « dame des 35 heures », mais aussi des emplois jeunes et de la Couverture Maladie Universelle défend quand à elle l’une des formes les plus abjectes de néo-libéralisme sauvage : les paradis fiscaux. Explications. Depuis 1997, il existe en France 44 « zones franches urbaines». Les « ZFU » (2), pour parler administrativement correct, permettent aux entreprises bénéficiaires des exonérations de l’impôt sur les bénéfices, de taxe professionnelle, taxe foncière sur les propriétés bâties, charges sociales patronales, etcetera. La liste est longue, et pourtant non exhaustive, car il existe une ribambelle d’impôts et de charges que doivent subir les entreprises françaises pour l’intérêt général de particuliers, comme les agriculteurs, les salariés de France Telecom, demain les retraités d’EDF…
Ces impôts, évidemment, poussent nombre d’entreprises à la ruine : c’est soit l’URSSAF (3), soit les salaires ! Puisque l’Etat est prioritaire sur tout autre créancier, une faillite est souvent suivie de difficultés chez les fournisseurs, quant aux salariés, ils n’ont qu’à retrouver du boulot en touchant les « ASSEDIC » (4). Ces mêmes charges érodent le pouvoir d’achat des salariés, quand les impôts éliminent toute idée de rentabilité pour d’éventuels investisseurs. Pas étonnant dans ces conditions que les Français créent peu d’entreprises, même si d’après de multiples sondages ils en rêvent tous !
En France comme ailleurs, la mise en pratique de politiques d’urbanisme a détruit des villes, et l’ambition démesurée des architectes sociaux a créé de vastes ghettos, aussitôt emplis d’une forte population immigrée. Les différentes « politique de la ville » n’y ont rien donné, pas plus que l’Education Nationale n’a pu inculquer un semblant d’éducation à la place des familles, tandis que la police perdait peu à peu le contrôle de vastes zones, laissant place à la loi de la jungle, celle des bandes et des gangs. Quelques années plus tard ces bombes à retardement ont explosé un peu partout, et ce qu’on appelle maintenant les « cités » sont de vastes dortoirs de pauvres, de chômeurs, et de délinquants.
C’est pour contrer ces deux catastrophes socialistes que les zones franches ont vu le jour. Pour une fois, l’initiative va dans le bon sens : il s’agit de rendre un peu de liberté, et non d’en confisquer un peu plus comme lors des multiples « contrats de ville » ou « plans d’insertion urbain» ou je ne sais quels autres programmes de dépenses inutiles. Et pour une fois, un programme étatique est un succès (5).
En effet, dans les 44 quartiers, les statistiques du Ministère de l’Emploi montrent qu’il y a eu multiplication par deux des emplois en 5 ans, dont plus de 90% sont exonérés de charges, les entreprises bénéficiant des exemptions diverses. Le rythme de création d’emploi a donc largement dépassé celui du reste de la France, sans même avoir besoin de faire un calcul quelconque : on ne bat pas le rappel des retraités pour pallier au manque de main d’oeuvre !
Bien sûr il y a eu un effet d’aubaine, des entreprises ont déménagé pour profiter des exonérations, mais dans l’ensemble le plan démontre que libérées du poids financier de l’Etat les entrepreneurs français peuvent créer des richesses, des emplois. Et ce, y compris pour ceux que beaucoup tiennent pour perdus à tout jamais : chômeurs de longue durée, jeunes sans aucun diplôme. Ailleurs on les appelle des « working poors » mais en France ils ne pouvaient jusque là pas travailler, n’étant pas assez productifs. Maintenant ils ont une dignité et un salaire : il y a de la place pour tout le monde dans un système libéré.
Le Grand Projet de Ville (6), Lille et ses environs, a amplement profité de ces ZFU : 6 quartiers (7), des dizaines de milliers de personnes, une superficie immense. Tous, à droite comme à gauche sÂ’en réjouissent, dont Martine Aubry, bien évidemment : «j ‘ai pour ma part toujours plaidé pour le maintien des zones franches » (8) . NÂ’allez tout de même pas croire que le soutien des politiciens est inconditionnel : « Nous nous étions battus avec Claude Bartolone pour mettre des verrous supplémentaires afin que l’argent public n’aille pas n’importe où ». Des verrous ? Oui car pour être une « ZFU » il faut répondre à des critères précis.
Plus de 10.000 habitants, taux de chômage supérieur de 25% à la moyenne nationale (donc d’au moins 15%), au moins 36% de jeunes, plus de 29% de plus de 15 ans sans diplôme quelconque, et un potentiel fiscal de moins de 580 euros par habitant, tels sont les critères d’une ZFU. A leur énoncé on mesure bien l’état de décrépitude des quartiers : pour que les hommes de l’Etat s’avouent vaincus et renoncent à des impôts, il faut vraiment en arriver à la dernière extrémité. A noter d’ailleurs dans le cadre des ZFUs des renforts de police étaient prévus, et se sont révélés nécessaires (9) : les cités choisies étaient aussi de hauts lieux de la criminalité, dans un état avancé de sécession.
Pour les entreprises aussi il existe des conditions pour bénéficier des exemptions : moins de 50 salariés, pour les entreprises déjà sur place, il faut qu’elles exercent leur activité sur le « marché local ». Je ne vous fais pas le détail car il existe bien sûr des tas d’exceptions, de cas particuliers, des seuils et des plafonds, des quotas et des limitations, et un tas d’interrogations : quid des entreprises qui grossissent, de celles qui réalisent un gros coup à l’étranger devenant « internationales », des salariés embauchés après telle ou telle date, des changements de législation en cours de route, des interprétations divergentes entre les URSSAF et les entreprises…
Bref, en apparence seulement les ZFUs sont des paradis fiscaux : voilà peut-être pourquoi elles ont le soutien des hommes de l’Etat. Elles leur donnent un sentiment de pouvoir : grâce à leurs mesures « ciblées », aux « contrats » passés avec les entreprises, à leur grande magnanimité, des gens retrouvent un emploi auparavant interdit, des familles l’espoir, et des entrepreneurs réalisent leurs projets. Avec le pouvoir vient aussi la gloire : quand les politiciens interviennent pour trancher un litige entre une caisse d’URSSAF et une entreprise par exemple. Et au final les ZFUs ne concernent que peu de gens en France, ils ne sont pas nombreux à goûter à la liberté : tout est sous contrôle.
On se demande pourquoi d’ailleurs il y en a si peu de ces zones franches. Une telle réussite ne devrait-elle pas être étendue à la France entière ? Que nenni disent les hommes de l’Etat, les zones franches coûtent cher ! Cette perception est liée à leur mode de calcul : pour eux, peu importe qu’une personne ait un emploi, soit tirée d’affaire, et sa famille avec. Dans les zones franches, les exonérations de charges sont pour l’employeur, le salarié continue de les verser. Les URSSAF prennent donc 20% de charges au lieu de 50%, et c’est donc pour l’Etat une « perte » de 30%. Curieux raisonnement, car sans la baisse des charges, aucun des emplois créés en zone franche n’aurait vu le jour. L’Etat est donc « gagnant » car sans les nouveaux emplois il verserait des subventions, des RMIs, des ASSEDIC, des allocations en tout sens à des chômeurs, au lieu de toucher « seulement » 20% de charges sur les salaires ! Où est donc la perte ?
Malheureusement, ce n’est pas pour demain que la France deviendra une vaste zone franche. L’expérience n’est pas concluante aux yeux des politiciens : peut-être vont-ils étendre les zones actuelles, accepter de nouvelles ZFUs, mais certainement pas baisser les impôts sur la France entière. Et puisque demain avec l’Union Européenne on nous promet une « harmonisation » fiscale, c’est à dire un code fiscal unique pour l’Europe entière, et qu’une simple baisse de taux de TVA requiert l’accord de la commission de Bruxelles (10) , on doute que les zones franches puissent s’étendre à un département ou une région entière. Imaginez donc un instant : la concurrence fiscale ? enfer et damnation ! La liberté ? abomination de la désolation ! Et le pire de tout ? C’est que ça marche, et quelqu’un finirait par se rendre compte que finalement la principale cause de pauvreté, ce sont les impôts !
1 Avant la CMU, 6 millions de personnes n’avaient pas de couverture maladie. Ils n’avaient pas non plus le droit de prendre une assurance privée d’ailleurs.
2 Chambre de Commerce de Lille : http://www.lille.cci.fr/pacte-ville/
3 Union des Républiques SociaÂ… oops, pardon : Union de recouvrement des cotisations de sécurité Sociale et d’allocations familiales.
4 Association pour l’emploi dans l’industrie et le commerce, en fait désigne les indemnités de chômage versées par lÂ’ASSEDIC.
5 Cf. rapport au Sénat: http://www.senat.fr/rap/r01-354/r01-354.html
6 ce nom pompeux désigne la réunion administrative des villes de Lille, Roubaix, Tourcoing, Wattrelos, Valenciennes
7 pour plus de détails voir : http://www.lille.cci.fr/pacte-ville/pact02.html
8 Le Monde : Le Nord Pas de Calais apprécie ses zones franches urbaines http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3228–305242-,00.html
9 http://www.senat.fr/rap/r01-354/r01-354_mono.html#toc197
10 JP Raffarin avait promis aux restaurateurs de baisser la TVA pour eux. Le lendemain de sa prise de pouvoir il avouait qu’il ne peut le faire car il doit demander à la commission de Bruxelles. Vive la démocratie.
Je découvre avec intéret votre site qui contient des articles forts intéressants, et j’ai donc choisi de réagir sur ce dernier car mon point de vue diverge du votre.
Je pense que les zones franches ne sont pas « rentables » pour l’Etat français car elles ne rapporte aucun impot sur les sociétés, ni meme taxe professionnelle. D’autre part, les entreprises qui s’installent dans ces zones sont souvent à caractère industriel, donc utilisant du personnel peu qualifié, donc peu rémunéré, donc non ou peu imposable…
Pour ce qui est des créations d’emplois, je suis mitigé aussi. J’ai habité un an à Marseille et j’ai eu l’occasion de travailler occasionnellement dans les quartiers nords (zone franche). Il se trouve que les entreprises ne recrutent pas dans les quartiers ou elles sont implantées, car elles sont trop exposées aux problemes que nous connaissons tous (vol, chantage racial…).
Nous sommes déjà 50% de la population active à payer des impots, donc tu voudrais que tout le territoire soit en zone franche??!
L’intéret des zones franches m’apparait limité lorsque je regarde le cas de Daewoo qui est venu en France, qui s’est installé, a investi pour construire son usine. La france (gentille comme elle est) les a exonéré de tout impot pendant un certain temps. A la fin de cette période d’avantages fiscaux, ils ont repris leur clic et leurs clac et sont rentrés chez eux… a la France de financer les plans sociaux et aux ASSEDIC de casquer.
Je penses surtout que le travail en France n’est pas assez compétitif par rapport à nos voisins européens, par excés de charges (patronales et salariales).
Mais c’est un choix, soit on distribue des alloc à tour de bras, on a un systeme de santé performant (quoi que de plus en plus en lutte), un système éducatif également performant (quoi que de plus en plus en galère)… bon ok, on est mal barré.
Conclusion: la faute se situe du coté de la gauche qui n’a pas utilisé les fruits de la croissance économique de 98 à 2001 pour faire les réformes et les chantiers nécessaires pour assurer la pérennité des structures qui faisaient de la France un pays en avance (dans les années 90).
Nous voici en plein ralentissement économique bloquant toute politique d’investissement du gouvernement pour faire relancer la machine, et celà jusqu’à fin 2003 d’aprés moi.
Mais pourrons nous seulement rattraper le temps perdu une fois que l’économie ira mieux ou serons nous en face d’une France ou le niveau de vétusté aura été sous-estimé?
Bonne continuation pour votre site.
1 SMIC taxé à 20% = x euros dans les caisses de l’Etat
0 SMIC taxé à 50% = 0 euros dans les caisses de l’Etat
Qu’est ce qui est le plus rentable ?
Bien évidemment les « ZFUs » créent des comportements d’opportunisme, et il vaudrait mieux soit laisser la politique fiscale aux régions (pour la concurrence fiscale en France), soit mettre tout le monde au même niveau.
La conclusion de mon article est qu’il faut étendre les zones franches à la France entière, sous entendu il faut baisser massivement les impôts. Un premier pas vers plus de liberté économique, à défaut d’abolir les 10.000 pages du code du travail par exemple…
Bonjour,
Merci de me lister un site web répertoriant directement avec coordonnées directes de tous les paradis fiscaux de la planète dans le cadre d’une étude.
Bien cordialement,
Mr Gran
fransouski@aol.cm
Paradis fiscal, début de liste :
Le Luxembourg….
Autrement tu peux voir chez ATTAC tu devrais pouvoir récupérer les infos que tu cherches.
Monaco
Belgique
Suisse
UK
Irlande
Etc..
Bref, toute l’Europe sauf la France et les pays Scandinaves sont des paradis fiscaux.
Le Luxembourg:PIB/hab le plus fort du monde(environ 150000F par habitant par an).
> Pas étonnant dans ces conditions que les Français
> créent peu d’entreprises, même si d’après de
> multiples sondages ils en rêvent tous !
Ils rêvent de créer une entreprise ou de réaliser un projet ?
Car dans le 2eme cas, une association suffit …
Une association, en fait, c’est le libéralisme, mais sans la volonté de faire de l’argent : c’est avec la volonté de faire quelque chose de concret ….
PS : je suis desole de faire revenir plusieurs forums sur le même truc, mais ça me permet de m’expliquer.
Jocelyn M nous dit que dans une association il n’y a pas la volonté de « faire » de l’argent;puis elle ajoute que c’est la volonté de faire quelque chose de « concret »!
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A quoi sert l’argent?
NON, le Luxembourg n’est pas un paradis fiscal !!!!!
Il s’agit juste d’un pays à régime fiscal privilégié !
S’il vous plait, tous, renseignez vous sérieusement avant de sortir de pareilles conneries ! et comme j’ai toujours espoir que les gens admettent leur ignorance et se cultivent intelligemment, si vous voulez savoir ce qu’est un paradis fiscal, allez donc consulter des sites sérieux, tels que celui de l’OCDE, également http://www.transnationale.org sous la rubrique paradis fiscal !
Mais s’il vous plait, arrêter de parler de choses que vous ne connaissez pas !