Porto Alegre

Le libéralisme n’est pas la collusion entre les hommes de l’Etat et les intérêts économiques. Le banquet de Davos n’est donc pas une vitrine du libéralisme et encore moins du « néolibéralisme », notion qui ne signifie rien mais qui sert d’épouvantail aux marxistes de Porto Alegre. On se demande qui sont les plus éloignés du « Laissez-faire » et d’une d’une société libre où règnent les droits individuels. Est-ce les politiciens et les fonctionnaires de l’État mondial réunis à New York pour piloter la gouvernance mondiale ou alors les écolos-mondialistes du contre-forum de Porto Alegre qui veulent imposer leur solidarisme ?

Tant que les hommes de l’État américain peuvent imposer leur volonté, l’État mondial sera sans doute favorable au libre-échange. Mais on frémit de peur à l’idée de voir une autre puissance imposer sa loi. S’il existe une gouvernance mondiale, il vaut encore mieux que ce soit les États-Unis qui la dirige. Toutefois, confondre le banquet de Davos, le FMI et l’ONU avec le libéralisme est évidemment stupide.

On ne répétera jamais assez que le libéralisme, qu’il soit classique – dont la théorie la plus complète a sans doute été écrite par Hayek (« Droit, législation et liberté »)- ou qu’il soit plus radical dans sa condamnation de l’État en s’appuyant sur le principe de la propriété de soi, réside toujours dans une dépolitisation de la société.

Les libéraux aspirent à une réduction et à une décentralisation du pouvoir politique, voire à une extinction pure et simple du pouvoir politique.

Or ce que l’on peut appeler « l’État mondial » est précisément un ensemble d’institutions qui tend par nature à coordonner les politiques, à les uniformiser, et sans doute bientôt à les gérer de manière centralisée. La construction politique de l’Europe, dont l’Euro est une étape nécessaire, ressemble à une vaste opération de centralisation du pouvoir politique. La politique et la démocratie ont leur logique propre qui est l’accroissement et la centralisation du pouvoir de contrainte de l’État. La collusion entre le pouvoir politique, les institutions mondiales et les industriels n’a rien de libérale. Elle est le contraire du libéralisme, même si un des sous-produits de cette association d’intérêts est peut-être un accroissement du libre-échange économique. Un autre sous-produit, volontaire et pernicieux celui-là, est l’emprise des hommes des États sur les destinées individuelles.

Les pèlerins de Porto Alegre ne sont pas contre le mondialisme, c’est-à-dire l’intégration politique mondiale, bien au contraire. Ils souhaitent politiser encore davantage la société en changeant les normes fixées par l’État mondial. La force légale mais injuste de l’État est pour eux le seul moyen de réaliser leur rêve de « solidarité » et d’appauvrissement des pays occidentaux au profit des autres. Que cela conduise à un appauvrissement généralisé ne les ennuie pas, ils ne veulent pas le savoir. Que cela piétine la liberté individuelle n’a pas d’importance pour eux. Car pour eux, si les uns sont pauvres et faibles c’est parce que d’autres sont riches et forts. Ils ont dans l’esprit que les premiers ne peuvent exister que parce que les seconds les exploitent.

Alors pour masquer la violence politique de leur projet de solidarité forcée, ils inventent des épouvantails (le néolibéralisme). Ils sont même subventionnés pour cela:  » Le mouvement Attac et Le Monde diplomatique auraient reçu une aide de 80 000 euros du ministère français des affaires étrangères pour les aider à organiser le forum. » (Le Monde.fr : Une subvention du Quai d’Orsay à Attac). Ceux qui font la guerre au « néolibéralisme » sont des fonctionnaires, des syndicalistes ou des politiciens, des gens qui vivent grâce à l’argent public. Il est fort compréhensible qu’ils veuillent se protéger de la menace qui pèse sur leur gagne-pain, même s’il faut écraser les droits individuels en chemin.

A porto Alegre, on confond sans peine le libre-échange et la domination politique. On manifeste à la fois contre l’un et l’autre, en les associant comme les deux faces d’une même pièce. « La zone de libre-échange des Amériques, prévue pour 2005 et chère à George W. Bush, est en effet souvent perçue en Amérique Latine comme un instrument de domination des États-Unis. « Le FMI hors d’ici », « Non à l’OMC et à la Banque mondiale », figurent parmi les slogans les plus scandés par les manifestants » (Le Monde.fr : A Porto Alegre, une marche contre la « mondialisation néolibérale »). Les termes sont prudents mais la thèse est claire: la mondialisation économique signifie nécessairement la domination politique américaine. Il est évident que dans un monde étatisé, la société qui s’enrichit par l’échange libre et l’effort de productivité et d’inventivité alimente un État puissant, qui peut parasiter la société sans trop l’appauvrir. Cela ne réfute pas les heureuses conséquences du libre-échange mais l’État qui peut utiliser le vol légal de l’impôt pour pratiquer une politique étrangère dominatrice. Le libéralisme n’a pas besoin d’un Etat prédateur et dominateur. Il n’a même pas besoin d’Etat du tout.

En mêlant constamment le libre-échange, l’OMC, le FMI et l’État américain, les partisans de l’anti-mondialisation veulent faire croire qu’il existe quelque chose comme le « néolibéralisme » où l’État serait le complice nécessaire du libre-échange, alors que le pouvoir politique se définit justement comme une contrainte sur la liberté des échanges. Les frontières, les taxes, les politiques économiques, sociales ou étrangères sont autant de créations du pouvoir politique qui freinent le libre-échange.

« Notre devise est qu’un autre monde socialiste est possible, nous luttons contre le néolibéralisme et l’agression impérialiste » dit une militante du Syndicat des enseignants du Rio grande do Sul. Le marxisme, comme prêt-à-penser, est donc intact et immortel. Il imprègne toujours les cervelles. Même si sa nocivité, tout comme celle du socialisme, a été amplement démontrée, il demeure la seule idéologie de ceux qui prétendent inventer un autre monde, plus « juste ». Pour juger de la pertinence du contre forum de Porto Alegre, il est inutile de se casser la tête, il suffit de se replonger dans l’histoire récentes des faillites et des crimes du marxisme.

Quant au libéralisme, il est véritablement l’avenir d’un monde plus heureux et plus prospère si ses défenseurs parviennent à le libérer de son association à tout pouvoir politique, avec lequel il est logiquement incompatible.