L’argument patriotique

La « lutte contre le terrorisme » fera bientôt sa première victime: la liberté. L’Etat réglementaire développe un nouvel argument: le patriotisme à toutes les sauces. Il nous est servi pour nous culpabiliser lorsque nous ne faisons pas ce que souhaitent les hommes de l’Etat, mais aussi pour nous préparer à subir de nouvelles agressions constructivistes, réglementaires. Après le patriotisme économique voici le patriotisme thérapeutique. Bernard Kouchner en appelle lui aussi aux vertus grégaires du patriotisme; cette fois pour supplier les médecins de ne prescrire les antibiotiques contre les « bactéries terroristes » qu’en cas d’urgence avérée. C’est ainsi que les socialistes entendent combattre la pénurie de médicaments utiles. Non pas en libérant la production, ce qui obligerait à libérer tout le système de soins, y compris la prescription et la « sécurité sociale », mais en organisant le rationnement « patriotique ».

On voit ici les limites d’un système hyper réglementé, incapable de s’adapter à la demande, pour des raisons de contraintes budgétaires et réglementaires. Alors que Mises et Hayek ont démontré depuis les années trente (du siècle dernier) l’impossibilité de la planification économique, nous connaissons le « marché » de la santé le plus planifié de la planète. La fonctionnarisation des médecins, des pharmaciens (cf. l’article d’Hervé Duray sur la page libérale), le rationnement des soins ( déjà nettement perceptibles s’agissant des services des infirmiers « libéraux »), l’explosion des dépenses publiques pour la santé « publique » sont au bout du chemin constructiviste.

Dans une société d’hommes adultes, libres et responsables (c’est-à-dire subissant eux-mêmes les conséquences de leurs choix) on peut se demander pourquoi il faudrait subir cette régression infantile qu’est l’autorisation d’un médecin pour obtenir un médicament ? Je veux bien le consulter pour avoir son diagnostic et sa prescription pour me faire rembourser par mon assurance privée, en vertu d’un contrat, mais pourquoi le pharmacien n’est-il pas libre de vendre ses produits et moi de les acheter librement ?

Pourquoi ? Parce que certains individus détenant le pouvoir de faire des lois veulent me protéger. Merci mais je n’ai rien demandé. De plus dans un marché réellement libre, l’apprentissage des conduites utiles pour préserver sa santé se transmettrait de génération en génération, se diffuserait au sein de la société aux rythmes des innovations et des connaissances nouvelles, et des erreurs individuelles (mais notons qu’il vaut mieux apprendre à partir des erreurs individuelles que des erreurs affectant toute une collectivité, par exemple le sang contaminé). Les élites qui prétendent nous protéger n’ont pas d’autre but que nous dominer en produisant une idéologie (la protection sociale, la solidarité, la protection des consommateurs…).

L’idéologie d’urgence, du dernier recours, le patriotisme, est désormais utilisée sans vergogne par les hommes de l’Etat. Le fond de la bêtise moutonnière était déjà atteint en France, voilà que la lutte contre le terrorisme permet aux moutons en tête de troupeau de gratter encore quelques centimètres.