Le libre examen interdit

Il y a quelques mois, une journaliste bien connue avait été nommée directrice de l’information de la chaîne de télévision publique dénommée « France2 ».
Depuis quelques jours, elle aurait été déchargée – temporairement? – de la fonction.

Si on ne s’attarde pas sur l’écume des choses certes abondante et toujours renouvelée présentée à cette occasion, le motif de cette décision est flagrant : la liberté d’expression dans le secteur public de France ne saurait exister, l’interdiction de celle-ci ne saurait être transgressée, la perspective d’un referendum prochain le démontre une fois de plus s’il en était besoin.

Mais cette interdiction qu’on doit dénoncer avec la force qui lui sied car elle interdit le libre examen des téléspectateurs a des conséquences désastreuses qui, elles aussi, doivent être stigmatisées.

En effet, la direction de l’information de France2 avait projeté d’inviter Jose Manuel Barroso, Président de la Commission européenne, à l’émission « 100 minutes pour convaincre » du 21 avril 2005.
Suite à l’annonce par la présidence du groupe « France Télévisions » de l’invitation, Le Figaro du 25 mars 2005 sous le titre « Barroso censuré par Chirac ? » a informé que, suite à une « colère » de Jacques Chirac, l’émission avait été déprogrammée.
Il paraîtrait que, vendredi 25 mars 2005, la tension était à son comble à la direction de la communication du groupe.

Depuis toujours, les chaînes de télévision du secteur public ont été aux ordres tantôt de la majorité politique en place, tantôt des syndicats maison. Mais, d’un moment au suivant, en général, le centre de gravité change : et certains « observateurs » n’hésitent pas à dénommer, contre toute attente, « démocratie » le phénomène.

Ce qui vient d’arriver n’a donc rien d’extraordinaire. Disons que, sur le marché politique, le Président de la République a pris, cette fois, la main et attendons nous à ce que la tension évoquée débouche, à terme, par exemple, sur quelques privilèges nouveaux accordés aux syndicats maison du groupe ou sur une augmentation de la taxe dénommée « redevance de télévision » – le sujet est dans l’air depuis quelques temps – dont ceux-ci tireront profit. Les syndicats auront alors repris la main.

Ce qui apparaît certain, c’est qu’en raison de ce marché politique, le groupe « France Télévisions » n’a pas de clients, mais des redevables. Redevables, nous en sommes les dindons à défaut d’en être les esclaves puisque, contrairement au cas de l’organisation de la sécurité sociale obligatoire, nous ne sommes pas contraints de posséder une télévision ou de consommer les services du groupe.

Mais dans tous les cas, nous supportons un coût d’opportunité et ce coût est croissant étant donné, d’une part, l’essor des nouvelles techniques d’informations et de communications (NTIC) et, d’autre part, la diminution gigantesque des coûts que ces dernières permettent d’atteindre.

Ce qui est donc certain, c’est que, loin de contribuer, comme il le laisse imaginer en permanence, à ce que les entrepreneurs développent toujours plus les NTIC et à permettre ainsi, en particulier, que les plus démunis en tirent parti à cause de prix de plus en plus faibles, le marché politique fait tout son possible pour les entraver, voire pour les empêcher d’aboutir, à défaut de les détruire au vu et au su de tous.