Comme on apprend souvent beaucoup de choses en allant sur les sites ennemis, je suis donc allé faire un tour sur le site du Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. C’est en effet une source très riche d’informations, pour qui a le temps et la patience de les analyser. J’ai donc parcouru un document intitulé pudiquement « Rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution« .
Au lieu de « prélèvements obligatoires », j’aurais été tenté de choisir des synonymes plus précis et pertinents, tels que « extorsion » ou « vol » généralisés, mais je me serais écarté du politiquement correct, au risque de lourdes sanctions.
Pour ceux (nombreux à n’en point douter) qui n’auraient pas le courage de lire le document, regardez l’annexe 4 où figure la liste des dits « prélèvements obligatoires », et, si jamais il vous restait encore un peu d’énergie, regardez l’annexe 1 où est définie la notion de « prélèvement obligatoire » (et surtout ce qui est exclus). Voici ce que vous pourriez y apprendre :
– vous pensez peut-être qu’avec l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés, la TVA, la TIPP, les charges sociales, la CSG et quelques impôts locaux, on a fait à peu près le tour? Pas du tout. En fait, j’ai compté environ 180 prélèvements. Et encore, il y a quelques « agrégats » qui auraient mérité d’être détaillés, comme les « cotisations sociales effectives » en fin de liste (253 milliards d’euros tout de même). En 2ème position, la TVA avec 110 milliards d’euros. A l’opposé, il y a des prélèvements d’un montant si « faible » (du moins par rapport aux autres), qu’ils doivent coûter plus cher que leur montant à faire rentrer et à contrôler.
– on apprend que certaines taxes ne sont pas comptabilisées car elles sont considérées comme « volontaires » et/ou comme « la contrepartie d’un service rendu »! Le Ministère reconnaîtrait-il donc que les 700 milliards de prélèvements ne sont la contrepartie d’aucun service rendu? Un tel mea culpa serait bienvenu.
Comme exemples de taxes non comptabilisées : la redevance télé, la carte grise, les amendes (non fiscales), les droits de timbre sur passeports, etc. Contreparties de services rendus? On croit rêver (ou plutôt cauchemarder)!
– les « ristournes fiscales » ou « crédits d’impôts » sont déduits, ce qui pourrait paraître logique à première vue; mais comme il n’y a aucune réduction des dépenses publiques en contrepartie et que le déficit sera financé par un recours à l’emprunt, on peut légitimement se poser la question.
– le total s’élève pour 2003 à 683 milliards d’euros. Il dépassera les 700 milliards en 2004. Ca semble énorme, et ça l’est : le PIB de la France est d’environ 1.600 milliards et encore, on compte dedans le » prix » des services étatisés dont personne ne voudrait sur un marché libre, même gratuitement. Le seul problème est que les dépenses publiques, elles, approcheront les 900 milliards d’euros en 2004. Même en ajoutant aux prélèvements les montants non comptabilisés et les revenus du « patrimoine de l’Etat », ça fait un déficit gigantesque. Déficit financé par l’emprunt, autant d’argent qui n’ira pas renforcer les fonds propres d’entreprises productives et qui fera donc augmenter le chômage (tout comme les 15 milliards du plan Borloo).
J’arrête là l’analyse, pour ne pas alourdir le texte au-delà du raisonnable. Mais deux dernières réflexions me viennent à l’esprit :
– Un calcul simple montre que l’équivalent du RMI, accordé a TOUS les résidents français (enfants compris), sans condition de revenus, coûterait environ 300 milliards. En ajoutant le budget actuel de la police, la justice et la défense nationale (pour ceux qui tiennent a ces monopoles), on arriverait a 380 milliards. Mais que peuvent-ils bien faire avec 900 milliards? On se le demande…réponse (partielle) dans le site du Ministère. Je vous en parlerai un autre jour. Pour vous donner une idée, 900 milliards, ça correspond à près de 3 fois le SMIC pour chaque « foyer fiscal » !
– On dit que les français les plus créatifs s’expatrient. Il en reste tout de même quelques uns qui le sont suffisamment pour « inventer » plus de 180 impôts. Et jugez plutôt de la créativité des appellations : « impôt », « taxe », « surtaxe », « cotisation », « prélèvement », « contribution », « droits », « retenue », « versement », « redevance » et j’en oublie sûrement. Ah, ces énarques que le « monde entier » (qui, au fait?) nous envie. Pourquoi ne sont-ce pas ceux-là qui s’expatrient? Pourtant, ils pourraient apporter beaucoup à ces pauvres anglo-saxons qui n’ont trouvé que le mot « tax » pour nommer tous leurs prélèvements.
Colbert disait : « L’art de l’imposition consiste à plumer l’oie pour obtenir le plus possible de plumes avec le moins possible de cris »
A ce jeu de l’oie, il faut reconnaître que nos hommes politiques sont très forts.
Je constate qu’en ce jour de grève des fonctionnaires qui protestent pour leur pouvoir d’achat, personne, et surtout pas les médias, ne met en avant le fait que les salaires des fonctionnaires sont payés par nos impôts, que les prélèvements obligatoires sont colossaux en France, et que malgré cela l’Etat dépense 20% de plus que ce qu’il gagne tous les ans. Tant que nos compatriotes ne sauraont pas compter, la dépense publique a de beaux jours devant elle.
Merci Laurent pour cet exposé. Il est nécessaire comme tu le fais d’analyser, de décortiquer la réalité chiffrée.
Beaucoup de gens ne sont sensibles qu’Ã ce type d’arguments.
Mais c’est un travail de fourmi que chacun n’a pas forcément le courage d’entreprendre.
L’analyse de Laurent est pertinente comme souvent sur la PL. Je suis allée
faire un tour pour voir la chose de mes yeux et le contribuable lambda que
je suis est toujours émerveillé par la prose de nos énarques : comment
faire passer la pillule doit être leur préoccupation majeure. Comment
emballer la chose pour que ça ne provoque pas l’écoeurement.
Ah ! l’évolution « spontanée » des prélèvements… quelle belle chose ! et
l’élasticité spontanée des PO à l’activité économique, quelle oeuvre
magnifique ! Quelle belle façon de se rassurer ! On se tourne vers les pays
européens, et hop ! on constate qu’ils suivent la même courbe que nous,
on se rassure encore un peu : finalement on n’est pas si méchant que ça
avec le contributeur.
En point de PIB, l’État prélèvera en 2005 16,2 % contre 15,6 en 2003 mais
vogue la galère, on a prévu de faire baisser les PO pour l’administration de
la sécurité sociale de 21,8 à 20,6 ce qui comme chacun sait se réalisera : la
tendance des dépenses de sécurité sociale étant baissière, comme chacun
le sait depuis longtemps !
Dans le même temps, on prétend soutenir la consommation des ménages,
la compétitivité des entreprises et empêcher les méchantes délocalisations.
Ce brouet parfaitement mis en page et remarquablement présenté montre
s’il en était encore besoin que le troupeau n’a pas encore donné toute sa
laine. Le tondeur, mielleux, s’acharne avec un grand sourire à ne plus lui
laisser que la peau sur les os. Quelle classe ! Pour un peu le mouton
remercierait de tant d’égards.
Le pire, c’est que le Ministère reconnaît ce que la majorité des contribuables et des « ayants-droits » reprochent respectivement et depuis toujours au prélèvement de l’impôt et au versement des prestations sociales, à savoir que leur « système fiscalo-social » n’a jamais été en phase avec la réalité des possibilités et des besoins. Le rapport énonce (encadré n°3) que 40 pour cent des prélèvements d’impôt se basant sur les richesses créées de l’année antérieure, les spécificités du système « peuvent » (sic) introduire un écart entre l’évolution des « recettes » (sic bis) et l’activité économique, comme s’il s’agissait de décrire le possible effet indésirable d’un médicament, et comme s’il s’agissait de « recettes », du produit d’un travail économique. Alors que, non seulement ce système produit cet écart de facto, mais que tous les impôts, sans exception aucune, produisent cet écart et nuisent à l’activité économique présente et future. C’est à ce genre de calcul malsain, de prospective inepte et de terminologie déculpabilisante que se livrent tous ceux qui vivent aux dépens des richesses des autres… à la manière des bandits au début des « Sept Samourais » de Kurozawa : « Si nous pillons le village aujourd’hui, nous n’aurons rien à la saison prochaine » (Quelle preuve d’humanité!). Le vol d’Etat se conjugue ainsi au futur antérieur : « Si l’activité économique a été florissante, nous prendrons ce que nous aurions dû prendre… avec des indemnités de retard, s’il le faut! »
Erwan Quéinnec apporte une intéressante contribution sur ce sujet précis.
C’est dans le dernier numéro du Québecois libre, là :
http ://www.quebecoislibre.org/05/050115-6.htm
Il dit, entre autres choses : « Cette rationalité interventionniste est fondée
sur une illusion d’optique qui, confinant à la cécité, débouche sur
l’aveuglement : tandis qu’une entreprise qui se restructure donne à voir
ses coûts immédiats (notamment sociaux) et dilue les bénéfices de son
action dans une augmentation générale du niveau de vie dont nul ne sait
plus saisir l’origine (la fameuse main invisible), l’État, lui, donne à voir ses
bénéfices immédiats (car la plupart des administrations parviennent Ã
rendre quelque service) en diluant ses coûts (directs et indirects) dans le
puits sans fond du déficit budgétaire. »
Plus loin, il remarque finement : « CÂ’est pourquoi, sur le plan de la
rhétorique, le service public gagne toujours : les pistes sur lesquelles il
court ne comportent quÂ’un couloir, le sien. »
Et il termine avec cette phrase que nous pourrions faire nôtre : « Avant de
se résoudre à changer nos « façons collectives de travailler » (une phrase
tirée du petit livre rouge ?) est-il permis au citoyen d’inviter les décideurs
politiques de France et d’ailleurs à changer leurs façons individuelles de
penser ? En attendant mieux, le discours libéral nÂ’a pas dÂ’autre ambition. »
Bonne lecture.
France : +45 % sans la TVA
Etats Unis : 17.5% avec ou sans la TVA.
Resultat :
Usa: 1 France: 0
Resultat final
Usa : +4500 personnes/an France : -4500
Perte financiére :
Usa : 0 France : 4500 x 45.7% + 4500 x Tva
Erreur
Usa : 0 France : 4500
Conclusion :
On plie bagages et on part dire definitivement bonjour aux cousins d’amerique.
A+
Emma,
Tres bon article en effet (note : E Queinnec a aussi ecrit un tres bon article sur la responsabilite sociale de l’entreprise sur le QL du mois dernier).
C’est vrai, l’etat dilue les couts et concentre les benefices alors que l’entreprise fait l’inverse. Et le service public gagne invariablement la bataille de l’opinion…publique!
Fred,
Ce que vous decrivez s’appelle « voter avec ses pieds ». Il faut esperer que la « globalisation » et l’ouverture des frontieres facilitent la mobilite et introduisent de plus en plus de concurrence entre les etats, pour le bonheur de tous. Pas etonnant de constater que les etats, a divers degres, s’accrochent au protectionnisme sous toutes ses formes.
Un truc horrible qui vient de me frapper, de me sonner, même :
« le PIB de la France est d’environ 1.600 milliards et encore, on compte dedans le » prix » des services étatisés dont personne ne voudrait sur un marché libre, même gratuitement »
Mais c’est vrai, ça, alors le PIB c’est gravement n’importe quoi ! Pour augmenter le PIB il suffit d’augmenter les impôts, ou m^mee d’augmenter le déficit budgétaire !!!
« Mais c’est vrai, ça, alors le PIB c’est gravement n’importe quoi ! Pour augmenter le PIB il suffit d’augmenter les impôts, ou m^mee d’augmenter le déficit budgétaire !!! »
Vous oubliez seulement qu’en augmentant les impots et/ou le deficit, on freine l’activite economique (privee, la vraie) presente et/ou future.
Cela dit, on peut imaginer que si l’augmentation de deficit est financee par un emprunt, et que l’emprunt est souscrit par des investisseurs etrangers, le PIB puisse mecaniquement augmenter pour un temps.
Mais il faudra un jour rembourser l’emprunt, et le montant de ce remboursement sera autant d’argent qui ne sera pas injecte dans l’economie productive!
D’après les règles de la comptabilité nationale qui sont à la base de la notion de production intérieure brute (PIB), il suffit d’augmenter les dépenses de l’Etat, et non pas la fiscalité, pour augmenter le PIB. D’après ces règles, une augmentation des dépenses de l’Etat donne automatiquement lieu à une augmentation du PIB, toutes choses égales par ailleurs.
La notion de PIB ne prend pas en compte le « financement », ni le patrimoine.
Si les dépenses de l’Etat sont payées par la monnaie résultant des recettes de la fiscalité, les recettes viennent en déduction de la notion de comptabilité nationale qu’est la consommation des ménages (ou des entreprises), voire de l’investissement (formation brute de capital fixe).
Dans ce cas, toutes choses égales par ailleurs, l’augmentation des dépenses de l’Etat va de pair avec la diminution de consommation
Si les dépenses sont payées par la monnaie résultant du produit d’un emprunt de monnaie, le produit de l’emprunt ne vient pas en déduction des concepts réels de la comptabilité nationale.
Dans ce cas, toutes choses égales par ailleurs, l’augmentation des dépenses de l’Etat va de pair avec rien. On est entré dans le merveilleux, dans le magique : Rueff dénommait Keynes, l’instigateur de la manoeuvre, le « magicien de Cambridge ».
Bien évidemment, « toutes choses égales par ailleurs » n’existe pas dans la réalité.
j’ ai lu votre article et je trouve que votre analyse très bien. c’ est vrai, il est a se demander ou passe les 720 milliards manquantes. les H politique ont vraiment l’ art et la manière de faire apparaitre seulement ce qu ‘il veulent que le « peuple » voit! mais je ne doute pas, qsu’il y a détournement de font, ou qu’ils utilisent tout ca comme prétex afin de maitenir l’impot a son maximun. et même si il y aura dminution d’impots, je pense que cela est calculé d’avance et que ce n’ est qu’un façon de nous beurer les yeux!
bye!
Impressionant de voir jusqu’où on peux pousser la prétendue « liberté individuelle »
Pratique pour ceux qui ont de l’argent, n’est ce pas messieurs dames!
Alors oui, partez aux USA, on vous entendra moins ici.
merci pour cette analuse, je usi élève en bac techno et je fais de l’économie, j’espere que votre analyse me sera utile pour mon cour :)
pouvait vous me dire svp en quoi les prelevements obligatoires freinent la consommation???
sans avoir fait l’ena,je suppose qu’il y a moins d’argent dans la poche du prelevé :D
Ci-joint un article qui démontre que la hausse des prélèvements contribue contrairement aus idées reçues à la hausse des revenus !!!!!!